Zoom Japon propose un rendez-vous exceptionnel avec l’histoire du manga et celle du Japon contemporain.
Les Français sont après les Japonais les plus grands consommateurs de mangas. Malgré un certain tassement du marché depuis deux ans, les amateurs restent nombreux. Pourtant, on peut regretter une méconnaissance de l’histoire de ce mode d’expression qui a connu son développement le plus important à la fin des années 1950. Pour aider à une meilleure appréhension du manga, Zoom Japon organise, dans le cadre du Salon du livre de Paris qui se déroule du 22 au 25 mars 2013, une grande exposition autour du magazine de manga Garo. Fondé en 1964, ce mensuel s’est imposé comme l’une des principales plates-formes d’expression pour les mangaka les plus talentueux de l’époque. Intitulé Garo : une histoire dans l’histoire, ce rendez-vous exceptionnel sera l’occasion non seulement de raconter le destin de cette publication, mais aussi de la replacer à la fois dans le contexte historique de l’archipel et dans l’histoire du manga lui-même. S’appuyant sur une collection unique en France de Garo, l’exposition présentera de nombreux exemplaires du magazine afin d’illustrer la diversité des talents qui y ont participé notamment au cours des dix premières années de son existence.
Le point de départ est 1959 avec l’apparition des deux premiers magazines de manga vendus en kiosque. Shônen Magazine et Shônen Sunday marquent ainsi un tournant décisif dans l’évolution du marché des médias au Japon. Pour la première fois en France, les premiers numéros de ces magazines seront présentés au public. De même, les visiteurs de l’exposition pourront découvrir le premier numéro de l’hebdomadaire Asahi Journal. Ce magazine d’information générale paraît aussi pour la première fois en 1959. Ancré à gauche, il sera la référence des fondateurs de Garo dont l’ambition sera de créer un magazine de mangas pour les jeunes orientés à gauche. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer la couverture du premier numéro de Garo et de la comparer à celui d’Asahi Journal pour comprendre la similitude. Créé pour accueillir Kamui-den [La Légende de Kamui, éd. Kana], l’œuvre magistrale de Shirato Sanpei qui s’interroge sur le fonctionnement de la société nippone au travers d’un récit se déroulant pendant la période féodale, Garo est d’une certaine façon un mensuel militant. Bon nombre des mangaka qui vont s’y produire (Mizuki Shigeru, Tsuge Yoshiharu, Tatsumi Yoshihiro, Hayashi Seiichi, Katsumata Susumu) publient des œuvres engagées tant sur le plan de la forme que celui du fond. Les premières années de vie de Garo correspondent à un moment crucial dans l’histoire du Japon d’après-guerre. Le pays a retrouvé des couleurs sur le plan économique. Il s’apprête à devenir la troisième puissance économique de la planète. Mais le géant économique est aussi un nain politique inféodé aux Etats-Unis, ce qui provoque la colère d’une partie de la société nippone qui conteste notamment la guerre du Vietnam et l’utilisation des bases américaines au Japon comme soutien aux opérations menées en Indochine. Garo s’en fait l’écho dans les mangas publiés, mais aussi dans les textes qui apparaissent entre les différentes histoires. Des intellectuels choisissent Garo pour s’exprimer, c’est ce qui explique en grande partie l’influence considérable du mensuel en dépit d’une diffusion relativement faible. A l’apogée de sa gloire à la fin des années 1960, Garo a un tirage de 80 000 exemplaires. La qualité des œuvres qu’on y trouve incite des éditeurs plus importants que la modeste maison d’édition Seirindô à lancer des magazines concurrents. Même Tezuka Osamu, le père du manga moderne, se sent obligé, en 1967, de créer COM pour rivaliser avec Garo. Les visiteurs de l’exposition pourront également observer le premier numéro de COM, mais également les numéros uns de la plupart des magazines de manga qui apparaissent à cette période (Shûkan Manga Action, Shônen Jump, Big Comic, Shônen Champion). Une première en France que Zoom Japon est fier de présenter. L’arrivée de ces nouvelles publications sonnent le glas de Garo dans la mesure où, dès le début des années 1970, le pays se normalise et la jeunesse contestataire s’assagit pour profiter pleinement des bienfaits du développement économique. Le manga de masse prend peu à peu l’ascendant sur le manga “expérimental” signé Garo. C’est ce que vous pourrez découvrir au Salon du livre. Des visites guidées gratuites seront proposées pendant la durée de l’exposition.
Odaira Namihei
Evénement :
Garo, une histoire dans l’histoire Du 22 au 25 mars 2013 au Salon du livre de Paris. Stand Y22. www.salondulivreparis.com