Je rêvais de faire la fête à la française. Je fais partie de ces Japonais influencés par le film La Boum ! Arrivée en France, j’ai participé à ma première boum lors du réveillon de 1990. Avec une amie japonaise, nous étions invitées à une soirée organisée par des Français d’un certain âge. Nous étions les seules jeunes et asiatiques parmi la trentaine d’invités. Tout le monde était bien habillé, les femmes avaient un maquillage soigné et des décolletés très profonds. Quand je m’amusais innocemment à me poudrer de paillettes dorées, des femmes me les ont empruntées et se les sont appliquées sur leur corps. C’était impressionnant et j’ai appris qu’en France il n’y avait pas d’âge pour se divertir ouvertement et plaire aux personnes de l’autre sexe (même du même sexe de temps en temps). Ce n’était pas exactement La Boum, mais l’esprit était là.
Depuis, j’ai assisté à plusieurs fêtes en retenant cette première leçon. Il fallait penser au décolleté le plus décolleté que possible et à se faire briller par tous les moyens possibles. Les résultats ont été plutôt positifs. Or je ne savais pas à l’époque qu’il fallait aussi savoir parler avec des inconnus, en plus en français. A cause de ce dernier détail, les grandes fêtes sont très douloureuses pour moi, encore aujourd’hui. Si je ne peux pas les éviter, je bois et je danse toute la soirée. D’ailleurs, c’est peut-être ce que tout le monde fait ? J’ai enfin appris comment passer une bonne soirée à la française.
Cet hiver, je serai dans mon pays et contente que ce soit sans doute sans fête. Au Japon, Noël n’est pas un événement familial mais commercial. Je ne ferai donc rien, le réveillon se passera à la maison en regardant une émission télévisée et en mangeant des soba (nouilles de sarrasin). Le jour de l’an se déroulera aussi simplement autour d’un repas traditionnel fait maison. Cela veut dire que je vais me régaler de la cuisine inscrite au patrimoine immatériel de l’Unesco ! Quel luxe ! Ça aussi c’est la fête !
Koga Ritsuko