Une superbe rétrospective consacrée au collectif d’artistes se tient au Musée Mori, à Roppongi.
Depuis février, au sommet du complexe Roppongi Hills, à Tôkyô, le Musée d’art Mori consacre son précieux espace à la plus grande rétrospective consacrée au travail de Chim↑Pom (Voir Zoom Japon n°20, mai 2012), le collectif de jeunes artistes présenté comme “le plus radical du Japon” par le musée.
A l’entrée, le visiteur est accueilli par l’impressionnante affiche de l’exposition Chim↑Pom Happy Spring sur laquelle posent une femme et cinq hommes. On croirait être venus pour un concert de J-pop, très loin de l’image engagée et anti-système du collectif. Une certaine confusion règne à ce moment-là.
Mais nous, visiteurs avertis, sommes vite rassurés. A peine avoir mis les pieds dans la première zone dénommée Ville et Publitude, nous sommes fascinés par un univers underground qui ne laissera sans doute personne indifférent, quel que soit son niveau de connaissance sur le collectif. A l’instar d’un chantier urbain abandonné, l’espace est construit sur deux niveaux avec des échafaudages et des canalisations. En bas, on y trouve les premières réalisations du collectif. Entre autres la version renouvelée de Super Rat, l’œuvre “provocante” qui a rendu le collectif populaire en 2006.
En passant par la zone asphaltée Michi (la route) et l’installation d’un immense sac-poubelle noir, le visiteur s’arrête dans une salle dédiée à l’inoubliable Don’t Follow the Wind, rappelant l’exposition inaccessible organisée dans la zone contaminée de Fukushima. Nous continuons. Dans l’espace Hiroshima, nous ne pouvons être qu’impressionné par l’imposante pyramide d’oiseaux en origami. Ici, on se souvient de la performance Pika! réalisée, en 2008, dans cette ville, première victime de la bombe atomique, qui avait conduit les artistes à organiser une conférence de presse pour s’excuser alors que leur objectif était à l’opposé des accusations portées contre eux.
C’est dans la zone suivante que le visiteur retrouve la fameuse peinture évoquant les réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi réalisée en 2011 sous la fresque anti-nucléaire Le Mythe de demain d’Okamoto Tarô en gare de Shibuya. A l’époque, qui aurait cru qu’une décennie plus tard, ce panneau traité de graffiti malveillant serait présenté dans un des musées les plus importants de la capitale ?
Après cet espace, il reste cinq zones à parcourir. Il faut prévoir au moins trois heures pour faire une visite complète et pour arriver aux zones consacrées à Ellie, la seule femme du groupe devenue mère en 2020. Cela dit, il faut bien plus de temps pour vraiment saisir l’ambition de cette rétrospective. La boutique fait partie des dix zones à visiter et réserve des surprises. Si vous avez des enfants de moins de 12 ans, ne manquez pas l’espace de garderie proposé par Ellie que le collectif a réalisé grâce à un financement participatif. Il y a également une annexe dans un espace à 30 minutes à pied du musée !
Après la visite, une question se pose. Est-ce que la popularisation de Chim↑Pom à travers cet événement ne contribuera pas à minorer l’impact de leurs futures actions ? Pourtant si le visiteur comprend que l’exposition elle-même est en soi une nouvelle tentative d’installation, il finit par sourire en regardant une nouvelle fois l’affiche à l’entrée sur laquelle les six artistes ont choisi de poser comme des vedettes.
Ritsuko Koga
Informations pratiques
Chim↑Pom Happy Spring. Jusqu’au 29 mai 2022. Musée d’art Mori. 1800 ¥ (tarif réduit 600 ¥) https://www.mori.art.museum/en/