En revanche, si l’on garde toujours un point de vue extérieur, 1970 apparaît avec moins de force comme un moment clé dans l’histoire contemporaine du pays. Et pourtant, pour de très nombreux Japonais, cette année-là représente bien un tournant, pas un de ces virages doux que l’on rencontre parfois sur une autoroute, mais une de ces épingles à cheveux dont on se souvient toute sa vie après l’avoir négociée au détour d’une route de montagne particulièrement ardue. En effet, 25 ans après la fin de la guerre, c’est un Japon nouveau qui s’impose à la population ou du moins les Japonais voient dans cette année-là comme l’amorce d’un changement radical dans leur existence. L’épithète “radical” pourrait sembler excessive, mais elle est loin de l’être.Après tout, la décennie précédente s’était achevée dans la confusion avec l’assaut donné par la police, en janvier 1969, contre les étudiants qui occupaient l’auditorium Yasuda de l’université de Tôkyô. L’arrestation de quelque 600 jeunes, lors de cette opération, avait apparemment mis un terme à plusieurs années de contestation chez les étudiants japonais. Le retour au calme dans les facs ne devait pas signifier la fin du bouillonnement ni celle de la violence. Cette dernière se manifeste deux fois de manière criante en 1970. Au début du printemps, le détournement du Boeing 727 de la Japan Airlines vers Pyongyang, en Corée du Nord, fait entrer le Japon dans l’ère du terrorisme d’extrême gauche ...