Le nouveau Premier ministre n’aura pas attendu longtemps avant de mettre en œuvre son plan de relance révolutionnaire.
Vainqueur incontestable des élections générales anticipées, le 16 décembre dernier, le Parti libéral-démocrate (PLD) avec à sa tête Abe Shinzô n’a pas tardé à multiplier les annonces pour redonner un coup de fouet à un pays en plein doute depuis plus de deux décennies. Ce que le Parti démocrate n’avait pas fait en 2009 lorsqu’il avait remporté haut la main le scrutin, le PLD a joué à fond la carte de l’action avec un programme économique baptisé Abenomics. Conscient que la priorité des Japonais était avant tout d’ordre économique, le nouveau Premier ministre a donc décidé de lancer un plan de relance audacieux qui fait figure d’expérience pour la plupart des pays occidentaux. Il faut rappeler que le Japon a connu les mêmes affres que l’Europe au début des années 1990 avec l’éclatement de la bulle financière qui a fini par avoir raison de la croissance de l’économie nippone. Confronté à une situation de blocage, le pays est entré dans une spirale déflationniste d’où il ne semblait pas en mesure de sortir. Voilà pourquoi le nouveau chef du gouvernement a choisi la manière forte avec un plan des plus ambitieux qui sera financé par le déficit. Vu d’Europe où l’on ne parle plus que de coupes budgétaires et d’économies, cette idée suscite une certaine curiosité, car elle présage peut-être ce qui sera entrepris sur le Vieux continent lorsqu’on se rendra compte que l’austérité ne permet pas d’améliorer la situation générale. Pour y parvenir, Abe Shinzô a d’abord repris la main sur la Banque du Japon pour lui fixer un triple objectif : relancer l’inflation, financer les dépenses publiques avec la planche à billets et faire baisser le cours du yen pour faciliter les exportations. Non seulement il est parvenu à faire chuter la devise de 15 % en quelques jours, mais la Bourse de Tôkyô a retrouvé la confiance qu’elle avait perdue depuis plusieurs années. La question est de savoir si cela va permettre de refaire démarrer un moteur économique en panne. Les plus optimistes rappellent que ce type de politique avait été mené avec succès dans les années 1930 et que les fondements de l’économie japonaise ne sont pas aussi mauvais qu’on peut croire. Les plus pessimistes mettent l’accent sur l’endettement record de l’archipel. Ce dernier point ne semble pas effrayer Abe Shinzô qui veut agir vite. Les élections pour le Sénat où le PLD n’a pas la majorité auront lieu en juillet. Il est indispensable pour lui de les remporter. Pour cela, il doit montrer qu’il est en première ligne sur le front économique. Les Japonais lui en sont déjà gré puisque, selon un sondage de l’Asahi Shimbun (16-17 février), 62 % d’entre eux lui accordent leur confiance. Un mois plus tôt, ils étaient 54 %.
Gabriel Bernard