Le Japon a perdu son statut de deuxième puissance économique de la planète au profit de la Chine. Et ça passe mal.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les Japonais ont du mal à digérer l’affaire des raviolis avariés made in China qui a pourtant eu lieu en 2008. Depuis cette date, la méfiance à l’égard du voisin continental reste vive, comme en témoigne le sondage réalisé conjointement par l’ONG japonaise Genron et le quotidien chinois China Daily auprès d’un échantillon représentatif de Chinois et de Japonais. 72 % des Japonais interrogés ont “une mauvaise opinion” de la Chine. Même si le pourcentage est meilleur qu’il y a deux ans (75,6 %), il reste élevé et s’explique encore en grande partie par les suites de l’affaire des raviolis. 71,1 % des personnes interrogées expliquent qu’elles ont “des doutes sur la façon dont le gouvernement chinois gère les questions alimentaires”. Il est probable qu’avec le temps ce sujet finisse par être oublié du côté nippon, mais il en est un autre qui risque de prendre de l’ampleur dans les années à venir. Il s’agit de la montée en puissance de la Chine et de son désir d’imposer sa loi pour garantir son approvisionnement en matières premières. 40,4 % des Japonais mettent en avant ce facteur pour justifier leur mauvaise opinion des Chinois. En 2009, ils étaient 35,9 % à évoquer ce sujet. Il ne fait aucun doute que la situation vacillante de l’économie japonaise ne va pas arranger les choses. L’annonce mi-août de la perte de son statut de seconde puissance économique mondiale au profit de la Chine va contribuer à assombrir le moral du Japon et de ses habitants qui pouvaient toujours s’appuyer sur leur rang pour trouver matière à fierté face à leur voisin. Ce dernier s’est longtemps montré méfiant avec le pays du Soleil-levant, estimant que le nationalisme nippon constituait une menace. Aujourd’hui, les Chinois ont une bien meilleure image du Japon. Selon l’enquête conjointe de Genron et du China Daily, seulement 18,9 % des Chinois ont “une mauvaise opinion” des Japonais contre 29,6 % l’année précédente. Si le comportement de l’armée impériale japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale, reste la principale raison évoquée par les personnes interrogées, les responsables du sondage notent que les jeunes générations sont de moins en moins sensibles à ce sujet. Elles voient dans le Japon un pays qui les séduit grâce à sa culture attrayante dominée par les manga et la mode. Le nombre croissant de touristes chinois qui se rendent plus facilement sur le territoire japonais, grâce à la délivrance plus souple de visas, témoigne de l’engouement pour le Japon. Cela pourrait donc favoriser une meilleure entente entre les deux pays. Reste que la fierté nationale sur laquelle les autorités des deux Etats s’appuient régulièrement quand un problème surgit entre eux n’est pas de nature à favoriser l’établissement de rapports de confiance à long terme. Interrogés sur la place du Japon en 2050, 21,3 % des Chinois estiment que le pays du Soleil-levant sera “une grande puissance militaire” contre 1,5 % des Japonais.
Gabriel Bernard