A l’occasion de son récent passage à Paris, l’architecte, lauréat du prix Pritzker 2013, est revenu sur ses différents projets. Zoom Japon a fait l’appel à ses lecteurs pour la construction de la Maison pour tous à Rikuzentakata. Les donateurs souhaiteraient savoir ce qu’il en devient actuellement ? Itô Toyô : Je tiens à les remercier pour leur grande générosité. A Rikuzentakata, c’est Mme Sugawara, une ancienne coiffeuse, qui était à la tête du groupe de personnes intéressées par la construction d'une Maison pour tous. Elle a ensuite monté une association à but non lucratif pour gérer la maison une fois achevée. Mais pour dire les choses franchement, vu le peu de logements aux alentours et le retard pris dans la reconstruction de Rikuzentakata, la Maison ne fonctionne pas assez bien pour accueillir les gens. De ce fait, j’ai monté le projet d’une association à but non lucratif Minna no Ie Network (Le réseau des Maisons pour tous) afin de bien les gérer et d’en faire mieux connaître les activités. En tant que président, j’ai déposé le dossier le 11 mars dernier. L’association devrait voir le jour très prochainement. Cette association gérera l’ensemble des maisons. Les autres architectes qui ont lancé le projet participent-ils aussi à cette nouvelle association comme Kuma Kengo, Sejima Kazuyo, Naitoh Hiroshi ou Yamamoto Riken ? I. T. : Maison pour tous était le projet du groupe Kishin no Kai (Association pour le retour) créé avec ces architectes. Mais actuellement, seule Mme Sejima se consacre à Maison pour tous. M. Yamamoto a pour sa part construit une maison avec les dons qu’il a lui-même récoltés. De fait, c’est Mme Sejima et moi, en collaboration avec de jeunes architectes, qui poursuivons cette tâche. Le groupe Kishin no Kai a été dissout au printemps. Combien de maisons ont été construites après celle de Rikuzentakata ? I. T. : Actuellement, on en compte dix et plusieurs autres sont en construction ou en projet. Comment sélectionnez-vous le lieu pour bâtir une Maison pour tous ? I. T. : D’abord, on visite les villes à pied, puis on rencontre les gens des collectivités locales (mairies et préfectures) avant d’établir le plan du bâtiment. C’est très difficile. Si le projet est bien accueilli par les habitants, les collectivités prennent ce projet comme un surplus de travail. Ce n’est pas évident en cette période de pleine reconstruction. Par ailleurs, il existe de grandes différences entre ce que nous pensons et ce que pensent les collectivités. Quoi qu’il en soit, la plupart des projets que nous avons menés à terme sont très appréciés et bien utilisés. Une fois bâtie, vous déplacez-vous pour voir, par exemple, comment les habitants utilisent la maison ? I. T. : Oui. J’y vais souvent. Dans la première construite à Sendai, je vais en discuter avec les gens autour d’un verre de saké. Vous demande-t-on aussi de réaliser une Maison pour tous adaptée à tel ou tel endroit ? I. T. : Oui, cela arrive au cours de débats-conférences. Mais la voix des habitants ne suffit pas pour aboutir à la construction d’une Maison pour tous. Il faut aussi obtenir l’intervention des collectivités locales. Par ailleurs, les problèmes sur le terrain et ceux concernant la gestion du projet sont considérables. Qu’en est-il du financement ? I. T. : Les collectivités n’accordent presque jamais de budget. Le financement provient d’entreprises japonaises et internationales ou des dons individuels, comme ceux collectés par Zoom Japon. Cela concerne-t-il aussi bien la construction que la gestion ? I. T. : Uniquement la construction. Pour la gestion, il arrive que des collectivités prennent en charge les frais d’électricité, de gaz et autres. Il y a aussi des cas où un comité en charge des logements sociaux provisoires s’occupent de la gestion. C’est une question qui n’est pas facile à résoudre. Notre nouvelle association a justement été créée pour apporter son aide à ce niveau. Comment votre association communique-t-elle ? I. T. : En fait, c’est plutôt vers l’étranger qu’on communique. Car au Japon, étrangement, on n’a pas l’habitude de faire des dons. On en a fait juste après le séisme, mais trois ans sont passés et peu de sociétés et d’individus ont poursuivi dans ce sens. Zoom Japon continue de transmettre des sommes reçues pour la gestion de la Maison pour tous à Rikuzentakata. En France aussi, les dons diminuent. Plutôt que de faire ...