Depuis qu’il a pris ses fonctions en 2013, le diplomate a tenté de convaincre ses compatriotes à se montrer plus ouverts. Après trois années passées en poste à Paris, Son Excellence l'Ambassadeur du Japon, SUZUKI Yôichi, quitte la capitale française. L’occasion de lui demander sa vision des relations franco-japonaises et comment celles-ci pourraient encore s’améliorer. Quelle était votre vision des rapports franco-japonais avant que vous preniez votre poste en 2013 ? Suzuki Yôichi : Avant d’arriver en France, j’avais une certaine appréhension. Je craignais que le Japon ne soit en train de disparaître du radar de la France. Mon pays avait traversé une longue période de crise que nous avons qualifiée de “deux décennies perdues” tandis que d’autres Etats comme la Chine ou la Corée du Sud étaient en phase ascendante. Et malgré un fort sentiment d’affection à l’égard du Japon, j’avais peur que les Français s’y intéressent moins. Mais je me suis vite rendu compte que j’étais arrivé à un moment où l’intérêt pour mon pays s'est renouvelé en France. Chez les jeunes, la culture populaire japonaise déjà bien ancrée a continué de faire des émules, et surtout, j’ai découvert un engouement pour la politique, l’économie et la culture de tradition. Bref, contrairement à ce que je pensais, les Français tournaient de nouveau leur regard vers le Japon. Cela signifie-t-il que vous n’avez pas eu d’effort à fournir ? S. Y. : Non, mais j’ai bénéficié des retrouvailles entre nos deux pays. J’ai été accueilli partout en France, à Paris comme en province, de manière chaleureuse et favorable. Il y avait une grande attente de la part de mes interlocuteurs. Plutôt qu’un manque d’intérêt, j’ai décelé une grande curiosité à l’égard de mon pays, beaucoup plus forte que ce que nous croyons au Japon même. J’ai été frappé par le fait qu’on considérait encore mon pays comme une puissance technologique. Avez-vous le sentiment que le Japon a su répondre à ces attentes ? S. Y. : Je pense qu’avec certaines personnalités japonaises, comme le Premier ministre Abe Shinzô qui incarne le renouveau du Japon, le travail a été facilité. Dans le domaine économique, quelques entreprises japonaises comme Mitsubishi Heavy Industries, Nissan, Nippon Steel ou encore des groupes de taille intermédiaire comme Toray ou Kubota ont permis aux Français de voir le Japon de plus près. C’est un point important qui n’était peut-être pas absent auparavant, mais qui était beaucoup moins visible au cours des deux décennies qui ont précédé mon arrivée. Le Japon avait été très présent jusqu’au tout début des années 1990 avant de perdre par la suite cette visibilité. Ce n’est que depuis les années 2010 qu’il retrouve un certain vernis. Quelle est votre part dans ce travail de mise en relation entre la France et le Japon ? S. Y. : Concrètement, sur le plan professionnel, dans mes contacts avec le gouvernement français, mes activités consistent à identifier les pistes de coopération les plus concrètes possibles, clarifier le mieux possible les éléments qui peuvent poser des difficultés ou encore faciliter les contacts autant que faire se peut entre les experts. Je crois que dans ce domaine, c’est une réussite. On commence d’ailleurs à voir l’aboutissement de projets plus concrets. Je pense notamment à un secteur important, celui des équipements de défense. Le Japon a longtemps été assez “timide” dans ce domaine, mais il y a eu une prise de conscience dans mon pays sur la nécessité de mieux se défendre....