Vous avez peut-être commencé en tant qu’auteur mineur, mais vous êtes rapidement devenu un best-seller, grâce à Yawara!. U. N. : Yawara! était pourtant au départ une sorte d’expérience. Je voulais voir quelles caractéristiques devaient posséder un manga pour devenir un succès. J’ai donc introduit un élément comique, qui était absent dans mes premières histoires, et j'ai décidé d’avoir un personnage féminin. Avant cela, je n’en avais jamais dessiné, mais j’ai compris que choisir une jolie fille rendrait ma bande dessinée plus attrayante pour le grand public. Dans un certain sens, Yawara! peut être considéré comme une sorte d’essai critique du manga sous forme dessinée. Cependant, beaucoup de gens ont pensé que je cherchais vraiment la célébrité et le succès. Bien sûr, tout le monde veut réussir dans ce qu'il entreprend, mais pour moi ce n’était pas seulement ça. Après tout, à la même période, je publiais Pineapple Army (éd. Glénat) et Master Keaton (éd. Kana) qui étaient tout sauf des histoires grand public. Quoi qu'il en soit, Yawara ! constitue une étape importante pour moi dans mon apprentissage en tant qu’artiste, et quand le premier volume a franchi la barre du million d’exemplaires vendus, j’ai réalisé que mes histoires pouvaient être populaires sans que je remette en cause mes conceptions. Ah, c'était donc intentionnel. U. N. : Bien sûr. Vous pouvez comparer Yawara! à un feuilleton télévisé tandis que mes autres travaux sont plus proches de la réalisation d’un long-métrage. J’aime les deux approches et je n’ai aucun problème à utiliser tel ou tel style, mais beaucoup de gens aiment coller une étiquette sur votre travail pour dire que vous êtes “majeur” ou “mineur”, “commercial” ou “haut de gamme”. Je pense que la même personne peut vouloir faire des choses différentes. Pas mal de gens se demandaient comment un auteur indépendant comme Urasawa avait fini par se retrouver dans un magazine grand public comme Big Comic. C’est un peu comme si une compagnie de théâtre d’avant-garde se produisait à la Comédie française ! Il est vrai que par le passé...