La célèbre pâtisserie de Kamakura, au sud de Tôkyô, ne manque pas de spécialités dont ses pains aux saveurs particulières.
Les Japonais ont toujours eu le talent, pour ainsi dire insolite, d’accommoder le pain, qui a fait son entrée officielle dans le pays au XIXe siècle. Parmi les grands classiques, vous avez le pain-nouilles à la sauce Worcestershire, le pain frit au curry, le sandwich aux croquettes de pomme de terre, le pain fourré aux haricots rouges sucrés…
A Kamakura, à moins d’une heure de Tôkyô, ville médiévale connue par ses temples et sa statue géante de Bouddha, se trouve une pâtisserie réputée pour son biscuit devenu la spécialité de la ville, le hato-sabure (sablé en forme de colombe). Toshima-ya a été fondée en 1894. Lorsque son fondateur a commencé à fabriquer les biscuits, les gens n’étaient pas habitués au goût du beurre, et il a vu son voisin à qui il en avait offert les donner à son chien… Si leurs biscuits, au goût presque nostalgique même pour les Occidentaux, évoquent la saveur des délices d’autrefois, leurs pains sont un joyeux mariage entre Occident et Orient : fromage-edamame, gingembre mariné, umeboshi (prune salée), œufs de cabillaud pimentés, nori (algue) ou encore saveur soupe-miso (!)… On ne sait pas si on mange du pain, un plat, ou de la soupe, et cette sensation confuse est assez amusante. Parfois, les pains sont fourrés aux okazu (petits plats accompagnant le riz) tels que le nikujaga (pommes de terre et viande cuites à la sauce soja et au sucre), le kinpira (carottes et salsifis coupés en lamelles et sautés avec un assaisonnement pimenté). Côté sucré, l’originalité est toujours présente. On peut bien évidemment déguster des pains classiques aux haricots rouges, mais aussi ceux au matcha, au hôjicha (thé torréfié), mélangés avec du beurre, de l’abricot ou du gyûhi (pâte de riz gluant sucrée)… Les formes carrées ou les petites boules mignonnes, nous donnent plutôt envie de les déguster en encas.
Ils ont été inventés surtout pour les élèves qui visitent la ville lors de voyages scolaires, car le patron de Toshima-ya regrettait de les voir déjeuner dans des fast foods, alors même qu’ils se trouvaient au cœur d’une ville historique… D’où tous ces goûts de la cuisine japonaise, populaire et familiale d’une autre époque. Les prix ne sont pas élevés pour ces pains fantaisies, une petite boule coûtant entre 70 et 80 yens (60 centimes). Les enfants japonais se souviennent peut-être de la table dressée avec amour par leur grand-mère en les mangeant ? Toujours est-il que même les touristes étrangers peuvent s’amuser en dégustant ces pains-okazu.
La maison Toshima-ya a dû arrêter la fabrication de son biscuit pendant et juste après la guerre, faute d’ingrédients. A la place, elle a été chargée de cuire le pain pour les rations, dont le goût n’était bien évidemment pas satisfaisant. Ce regret a fait que cette pâtisserie, bien plus tard, a commercialisé des pains qui ravissent les palais de tout le monde. Et c’est réussi.
Il existe plusieurs points de vente Toshima-ya, mais un seul magasin vend les pains, juste à la sortie de la gare de Kamakura. Il s’agit de Toshimaya Tobira-ten : Kanagawa-ken Kamakura-shi Komachi 1-6-20 (7 h-19 h, fermé le mardi).
Sekiguchi Ryôko